L’Université Senghor vibre au rythme de la Journée des Droits des Femmes.
Les études universitaires constituent-elles un frein au mariage des femmes ? Tel a été le thème débattu le 10 mars 2016 à la salle de Conférence de l’Université Senghor d’Alexandrie pour célébrer la journée internationale des femmes, en présence de Madame Omnéya Shaker responsable du Centre Numérique Francophone (CNF) d’Alexandrie et de M. Aliourne Dramé, Directeur du Département d’Administration-Gestion.
Ce débat ouvert organisé par la Société d’Art Oratoire de Senghor (SAOS) et modéré par Lafontaine Orvild, a mis aux prises deux camps. D’un côté, la partie affirmative (Aminata Samby, Martine Ndo, Rose Gassou, assistée de Louis Ndione) soutenant la position selon laquelle les études universitaires constituent un frein au mariage des femmes. De l’autre côté, la partie adverse (Thérèse Kondombo, Insha Kpodohoun, Marie Jeanne Senghor, assistée par Mexin Mintsa) allant à l’antipode de la partie affirmative postule que les études universitaires ne constituent en aucune façon un frein au mariage des femmes.
Amina Samby a introduit la position du gouvernement selon laquelle il n’est pas question pour les femmes de s’adonner aux études universitaires, car cela constitue une entrave à l’épanouissement du foyer. Chiffres à l’appui sur le pourcentage de femmes célibataires et professionnelles, le gouvernement est catégorique : « il faut stopper les études universitaires si l’on veut véritablement qu’il y a de la vie dans le foyer ».
En revanche, Thérèse clame qu’il convient de se situer dans temps quand on parle du mariage des femmes s’adonnant aux études universitaires. Si dans le passé les femmes n’avaient aucune autonomie, aujourd’hui les donnes ont changé. Les femmes intellectuelles se marient beaucoup plus que celles qui ne sont pas dans les études. Grâce aux études les femmes parviennent, un tant soit peu, à jouir de leur autonomie financière, et du coup, cela rend la vie au foyer plus attrayante.S’appuyant sur un argument « attaque à la personne » et adoptant une posture ironique et humoristique, Martine pointe l’hypocrisie qui règne chez les femmes universitaires. Cherchant à gagner la sympathie de l’assistance, confiante, elle se demande combien d’entre nous [femmes de l’Université Senghor] se marient ? Combien d’entre nous sont célibataires ? Si les études ne constituent pas un frein au mariage pourquoi êtes-vous [femmes universitaires] là ?Sans donner une réponse au flot de questions de Martine, Marie Jeanne a repris un pan de l’argument de la partie « affirmative » en lançant la question : qu’est-ce qui prouve que les femmes sont plus sensibles au mariage ? Par ailleurs, soutenant la thèse adverse selon laquelle les études supérieures ne sont pas un blocage au mariage des femmes, elle voit, au contraire, dans les études un effet bénéfique pour la vie en couple. Quand un homme épouse une femme qui a fait des études avancées cela rend prospère la vie en famille.Rose Gassou a souligné combien il ne revient pas à la femme de jouer un rôle de contestateur. S’appuyant sur des arguments d’autorité, elle a repris les thèses des auteurs contractualistes, à savoir, Hobbes [A l’état de nature l’homme est un loup pour l’homme] et Rousseau [L’homme est né bon c’est la société qui le déprave] pour établir une analogie, pour dire combien les études universitaires des femmes pervertissent le mariage. Elle estime que le temps de finir les études, les femmes coiffent déjà Sainte Catherine et qu’en franchissant la barre de la trentaine les femmes sont déjà trop vieilles.Fougueuse, Insha a soutenu avec véhémence que la femme se marie à tout âge. A cet égard, le temps consacré par les femmes aux études universitaires rapporte sur le plan économique et social et favorise l’épanouissement de la famille.Le modérateur, M. Orvild, a invité les assistants [ Mexin pour la partie affirmative et Louis pour celle de l’adverse] à intervenir.Mexin ne manque pas de souligner la maladresse de la partie adverse du fait de ne pas faire une analyseex ante et ex post en ce qui concerne les études universitaires des femmes. Il a soulevé combien les femmes universitaires, devenues professionnelles, sont trop chères à épouser. En conséquence, les études universitaires constituent parfois un frein au mariage des femmes.
Louis a enchaîné avec un argument provoquant le rire chez l’assistance « au lieu de venir à Senghor, il faudrait envoyer en Angleterre ceux qui soutiennent que les études universitaires constituent un handicap au mariage pour faire la différence entre Angleterre et pomme de terre ». Pour lui pas de différence entre homme/femme ni d’incompatibilité entre études et mariage. Ils sont complémentaires. Tout commence par l’éducation, la communication.
Le débat étant clos, le modérateur a invité le public à réagir. Il y a certains qui adoptent une position conservatrice, modeste. D’autres, optent pour une position progressiste. Pour les conservateurs, pas de question pour les femmes de s’investir dans des études universitaires, cela impulse et encourage le féminisme. Dès lors, les femmes deviennent trop difficiles à gérer et à manipuler. Une catégorie estime qu’il faut adopter une position mitoyenne et modeste et plaide pour un métissage moralité-éducation-instruction pour une femme accomplie. L’autre catégorie pense que le problème est dû aux tabous, aux manquements, aux stéréotypes, à la peur de la part de la famille de l’homme et qu’études et vie sociale sont insécables. Une autre frange est d’avis qu’il faut poser les mêmes questions adressées aux femmes aux hommes pour trouver une issue à ce débat. Donc les études universitaires ne constituent pas un frein pour le mariage des hommes, idem pour les femmes.
Lafontaine Orvild